Cette mission a été la cinquième mission effectuée durant l’année 2016 ; elle s’est déroulée à Bangui du 15 au 25 Novembre 2016. Comme d’habitude, nous avons logé au Centre d’Accueil Missionnaire de Bangui où nous avons été accueillis par Sœur Rita, Sœur Juliette, Sœur Rosine, toujours aussi chaleureuses.
A Bangui, nous avons surtout travaillé à l’Hôpital communautaire car la climatisation de la salle d’opération était efficace. Il faut savoir qu’à Bangui les salles d’opérations sont totalement closes, mais elles sont pourvues d’une climatisation qui en principe assure une température correcte. Malheureusement, la climatisation de la salle d’opération au Complexe pédiatrique était défectueuse, et après une première matinée opératoire épuisante, nous avons préféré rester à l’Hôpital communautaire où nous avons pu travailler dans de très bonnes conditions.
Comme ils le font à chacun de nos passages à Bangui, le Docteur Bertrand TEKPA, chef de service, et le Docteur Alfred ISSA MAPOUKA, que nous connaissons depuis plus de 20 ans, qui sont les deux chirurgiens du service de traumatologie, ont libéré pour nous une salle d’opérations et le personnel nécessaire pour toute la durée de notre séjour. Comme d’habitude, nous avons opéré durant les matinées et consulté les après midis.
Nous avons consulté au total 73 patients (beaucoup de malformations congénitales, dont 15 pieds bots varus équins, et beaucoup de déviations axiales des membres inférieurs), et nous avons opéré 24 patients.
A gauche, un genu varum «historique»
A droite une déviation en «coup de vent» également assez historique...
Nous avons beaucoup bénéficié de la présence du Frère Elkana NDAWATCHA, Directeur par intérim du CRHAM, qui aurait du aller à Rome pour la nomination de Mgr Dieudonné mais qui n’a pas pu obtenir son visa; il a étroitement participé à toute la mission et il nous a en particulier aidés pour toutes les séances opératoires. Comme pour les missions précédentes, toutes les anesthésies ont été parfaitement effectuées par Barthélémy FIOBOY, Technicien Supérieur en Anesthésie-Réanimation
Comme pour les missions précédentes nous avons travaillé normalement et circulé dans Bangui sans inquiétude et sans appréhension. Nous avons même été surpris par l’animation présente dans les rues le matin, avec beaucoup de circulation et même avec quelques ralentissements de la circulation (ne parlons pas de bouchons !) quand nous allions à l’hôpital.
Cependant il nous a semblé que le climat global était moins serein que lors de nos missions précédentes de Juin ou Septembre 2017 ; les gens nous ont paru plus inquiets, plus préoccupés. Il semble y avoir de plus en plus d’ONG si l’on en juge par le nombre toujours croissant de gros 4x4 dans les rues ; les ONG emploient beaucoup de personnel centrafricain, avec des salaires qui sont très supérieurs aux salaires habituels.
De ce fait une partie de la population profite de la situation et il semble qu’un fossé se creuse de plus en plus entre ceux qui sont relativement à l’aise et ceux qui ont tout perdu. La situation économique reste difficile et les prix sont en hausse constante. Beaucoup de familles ne peuvent plus payer les frais de la rééducation de leur enfant, et ceci explique que la part d’autofinancement du CRHAM, qui était proche de 40% ou 50% avant 2013, soit devenue infime depuis le coup d’état de 2012. Les effets de l’élection présidentielle du début de l’année 2016 semblent se faire attendre... En atterrissant à Bangui, on survole le camp de réfugiés de M’Poko, qui est situé juste à côté de la piste de l’aéroport. Nous avions eu l’occasion de le visiter en 2014 ; il est très bien organisé, mais il reste immense et accueille plusieurs milliers de réfugiés ; certains d’entre eux ne peuvent pas rentrer chez eux car leur maison a été détruite ou brulée ; d’autres n’osent pas retourner à leur domicile par peur de violences, d’autres enfin ne veulent pas quitter le centre où ils reçoivent une aide financière...
Cette mission nous a permis de confirmer l’intérêt de la méthode de Ponseti pour le traitement du pied bot varus équin congénital. En fait, il semble difficile de mettre en œuvre la méthode telle qu’elle a été décrite par Ponseti, impliquant un traitement continu par plâtres dès la naissance, puis par attelles jusqu’à et même après l’âge de la marche, car les familles acceptent mal les contraintes d’un traitement à long terme ; elles se lassent rapidement et interrompent le traitement, exposant à la récidive de la déformation.
Du fait de ce manque de coopération et de suivi de la part des familles, nous avons un peu modifié le protocole de Ponseti : il nous semble préférable de ne pas débuter le traitement dès la naissance ou dès les premiers mois, et d’attendre l’âge de 8 à 9 mois pour démarrer la correction par plâtres, qui dure un à deux mois, puis faire l’allongement du tendon d’Achille, opération minime et sans risques, puis replâtrer l’enfant encore pour deux mois (ce qui est nettement plus long que les trois semaines préconisées par Ponseti, mais qui nous parait beaucoup plus sûr...).
Ainsi la durée totale du traitement ne dépasse trois à quatre mois, et la famille n’a pas le temps de se lasser du traitement. On atteint l’âge de la marche avec un pied bien corrigé, et la mise en charge du pied lors de la marche diminue les risques de récidive, même en cas d’abandon des attelles qui sont recommandées en principe jusque vers l’âge de 2 ou même 3 ans. Et même si une opération complète est nécessaire, elle est grandement facilitée par une préparation par quelques plâtres de correction.
Au CRHAM, Frère Elkana a réalisé son rêve d’une école maternelle avec une classe ouverte aux enfants du voisinage, et également aux enfants handicapés. Les demandes d’inscription ont très rapidement dépassé le chiffre prévu. Nous avons été éblouis par l’animation de cette classe, et par la qualité de l’intégration des enfants handicapés au sein d’une classe « normale »...